À partir des années 2000, les victoires se multiplient contre les projets agricoles intensifs et donnent lieu à l’interdiction de l’usine des mille vaches (Somme) notamment. Les luttes se poursuivent aujourd’hui, avec de nouveaux types d’équipement : des projets de Center Parcs, un projet de serre tropicale géante dans le Pas-de-Calais, des “surf parks” ou des mobilisations contre des méga centres commerciaux et de loisirs.
En 2019, la ville de Saint-Jean-de-Luz, connue pour ses plages pittoresques et sa communauté de surfeurs, est secouée par une annonce inattendue. Le conseil municipal révèle un projet audacieux : la construction d’un Surf Park monumental, à seulement 1,5 km de l’océan. Ce parc d’attractions aquatique, soutenu par des géants de l’industrie promet des vagues artificielles et un tourisme florissant. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre, et l’indignation monte rapidement parmi les habitants et les surfeurs locaux. François Verdet, figure emblématique du militantisme sur la Côte Basque et fervent défenseur de l’océan, est à la pointe de l’opposition. Il ne peut tolérer l’idée que ce Surf Park puisse voir le jour si près des vagues naturelles qu’il chérit.
Avec le mouvement “Rame pour ta Planète”, il lance une pétition qui attire rapidement des dizaines de milliers de signatures
Elle unit ceux qui, comme lui, veulent protéger l’authenticité du surf et les terres agricoles contre une commercialisation excessive. François comprend rapidement que l’opposition ne peut se limiter à des manifestations symboliques. Il s’engage alors dans une action concrète et stratégique. Il rejette les “rituels” peu efficaces des mobilisations traditionnelles et cherche à créer un mouvement qui ait un impact réel et mesurable. Sous sa houlette, un collectif citoyen prend forme, rassemblant militants environnementaux, surfeurs, et citoyens préoccupés. Ils lancent une vaste campagne d’information, dénonçant les coûts écologiques et sociaux du projet. Ils organisent des débats publics, des collectes de signatures pour une pétition qui atteindra des dizaines de milliers de soutiens, et utilisent tous les moyens légaux à leur disposition pour contester le projet. François Vernet promeut une approche alliant radicalité dans les objectifs et pragmatisme dans les méthodes.
Des personnalités du surf, telles que Léa Brassy, rejoignent le mouvement, critiquant la transformation de leur sport en une banale marchandise. Leur persévérance porte ses fruits. Face à l’ampleur de la mobilisation, la région Nouvelle Aquitaine, retire son soutien financier au Surf Park, les investisseurs se mettent à douter et finalement, les promoteurs du projet abandonnent en 2021. Cette victoire est un exemple parmi des centaines d’autres de luttes locales qui sont parvenues à venir à bout de projet néfastes, injuste et polluants, après souvent des années de mobilisations. Car derrière des victoires célèbres comme le Larzac ou Notre Dame des Landes, on trouve aussi des luttes beaucoup moins relayés médiatiquement et politiquement. Ces victoires territoriales existent à toutes les échelles et dans tous les domaines. C’est cette histoire que nous allons vous raconter.
Juliette Piketty-Moine, doctorante à l’ENS, a réalisé la collecte de données pour l’enquête de la revue S!lence sur les mobilisations écologiques victorieuses.
Gaëtan Renaud, chargé d’enquêtes socio-économiques et environnementales, a réalisé une enquête sur 7 mois pour Terres de Luttes et S!lence. Son analyse s’appuie sur l’expérience de 42 collectifs dont la victoire a eu lieu entre 2014 et 2024.
Lancement du numéro ce soir avec Reporterre et Terre de Luttes au Ground Control à partir de 18h30.
