“Jamais j’aurai imaginé il y a un an raconter que j’ai eu un procès hier, que je tchatche avec mon avocate (…) c’est quand même assez dingue. Et dingue pas forcément dans le bon sens du terme. Après… C’est la vie. En tout cas, celle que j’ai décidé de mener”.
La vie de Rachel aujourd’hui, c’est une longue suite d’actions en faveur du climat.
A 20 ans, cette écologiste engagée, fille d’enseignants, sort d’un tribunal après son premier procès, accusée d’entrave à la circulation et mise en danger de la vie d’autrui, dans des circonstances que l’on ignore. La perspective d’une peine de prison lui fait peur mais, selon elle, c’est le prix à payer pour ce militantisme qui donne du sens à son existence.
Le déclic
Son engagement date de 2019. Rachel habite à Rouen, et cette année-là, l’explosion de l’usine chimique Lubrizol la révolte. “Le lundi, y’avait des élèves qui vomissaient tellement l’odeur était nauséabonde. Une ville entière plongée dans une odeur nauséabonde de produits chimiques. Et ça, ça a alerté personne… Aucun pouvoir publique. Encore maintenant, il n’y a eu aucune enquête de santé publique réelle de mise en place” explique Rachel.
Précision : en septembre 2024, une grande étude sur l’impact environnemental et sanitaire a été publiée. Le tourage de ce documentaire a eu lieu avant cette publication.
Reste que cet événement marque le début de son engagement.
Un engagement total, renforcé par une décision déterminante quelques mois plus tard : ne pas faire d’études pour se consacrer entièrement à cette cause.Rachel dit ne pas regretter ce choix même si elle reconnaît : « j’ai de plus en plus conscience de ce que je n’ai pas fait », notamment ne pas avoir vécu une vie étudiante plus légère et festive.
Son discours est construit, parfois radical, mais extrêmement touchant quand elle explique face caméra : “Si je lutte de cette manière, si je prends tous ces risques, c’est parce que j’aime les belles choses de ce monde. J’aime la nature, j’aime l’art, ma famille, j’aime passer du temps avec les gens que j’aime. Et, en fait, j’ai envie de vivre dans un monde où c’est possible de le faire”.
Quatre cinéastes pour 4 regards différents
A l’issue de son procès, Rachel est condamnée à une amende de plusieurs milliers d’euros, prison avec sursis et interdiction d’exercer son métier d’animatrice auprès de jeunes enfants.
Des sanctions lourdes qui n’entravent en rien sa volonté de poursuivre ses actions.
Rachel a donc 20 ans et affirme avec force : “Moi, je trouve que j’ai de la chance d’avoir 20 ans. Parce que je suis en France, avec tous les privilèges que cela implique. Quand je suis sur la route, quand je suis en pleine action – attachée à une statue que je viens de repeindre, peu importe – je me dis que c’est ma place. Et ce jour-là je n’aurai pas pu être ailleurs qu’ici. C’est la meilleure place à laquelle je puisse être”.
Trouver sa place quand on a 20 ans, c’est bien le sujet de ce documentaire.
Comment débuter sa vie de jeune adulte, comment s’affirmer dans cette société et espérer la faire bouger pour un avenir meilleur ?
A toutes ces questions et bien d’autres, quatre jeunes cinéastes ont choisi de répondre à travers 4 portraits. Celui de Rachel est signé Marie Monge, un film dont l’esthétisme tranche avec la complexité de la situation décrite par Rachel, cette urgence climatique qui la mobilise en permanence.
Les 3 autres épisodes, tout aussi réussis, portent un regard bienveillant sur cette génération.
Ils nous content les histoires de Lalla, rappeuse trans hyper émouvante, d’Antoine, agriculteur dont les journées sont rythmées par la météo et d’Eydel, juive orthodoxe, qui espère rencontrer l’homme de sa vie comme les autres jeunes filles du séminaire qu’elle fréquente.
Quatre films, très différents, mais qui nous mettent face à une double interrogation : que faisions-nous à 20 ans et à quoi rêvions-nous ?
La collection de documentaires « 20 ans, l’âge des engagements » est à voir sur arte.tv
