Toutes les choses agréables, il faut en avoir deux, donc on a deux Noëls. C’était une blague ukrainienne d’autrefois qui signalait qu’en Ukraine, deux calendriers religieux coexistent : le calendrier grégorien et le calendrier julien. Ainsi, la communauté chrétienne ukrainienne avait deux dates possibles pour fêter Noël : le 25 décembre et le 7 janvier.
La question des calendriers est très importante, même pour les personnes athées. D’abord, l’Église orthodoxe d’Ukraine, qui se sert du calendrier julien, a autorisé les paroisses à choisir l’une des deux dates dès 2022. Cela signifie qu’elles ont eu la possibilité de fêter Noël le 25 décembre au lieu du 7 janvier.
Fin 2021, le chef de l’Église orthodoxe ukrainienne s’est déclaré favorable à la date du 25 décembre comme date unique pour célébrer Noël. Il a évoqué la nécessité de prévoir une certaine période de transition, peut-être une dizaine d’années… Mais l’invasion russe en 2022 a donné un coup d’accélérateur à cette transition.
Plusieurs familles ont réalisé que la date était importante et qu’elles n’avaient plus envie de fêter Noël en même temps que la Russie, le pays qui a détruit en Ukraine plus de 500 lieux de culte – synagogues, mosquées, églises. Ainsi, elles se sont réunies le soir du 24 décembre 2022.
Le jour du 7 janvier 2023, pour la première fois depuis trois siècles, la messe de Noël a eu lieu dans une des églises de la Laure de Petchersk, située au cœur de Kyiv, non loin du quartier présidentiel. Jusqu’à janvier 2023, tout le territoire de ce patrimoine était contrôlé par l’Église orthodoxe affiliée au patriarcat de Moscou. Depuis le début de l’année 2023, il est passé sous le contrôle de l’État, qui a autorisé l’Église orthodoxe d’Ukraine à y organiser une messe de Noël.
L’orthodoxie russe a servi d’instrument de la guerre contre l’Ukraine pendant trop longtemps. C’était donc l’occasion de regagner l’espace qui avait été occupé, tout comme à Kherson ou dans la région de Kharkiv libérée. Une phrase très courante dans les rues de Kyiv ces jours-là était que les gens de toutes les religions sont les bienvenus. Je partage avec vous une blague très populaire : même ”tous les athées du patriarcat de Kyiv sont les bienvenus” ! Cette tolérance et cette souplesse me paraissent importantes pour comprendre l’Ukraine actuelle.
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